ASTERIA RUBENS





VIDEO DE PRESENTATION :

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SYNOPSIS :
  

Un, deux, trois, quatre, cinq,
cinq êtres humains, cinq personnalités,
pétris d'amour, de faiblesse, de beauté et de vie :
- Sung
- Sunnivan
- Moana
- Iloane
- Terran
partis en voyage à l'autre bout du globe,
se retrouvent dans un monde paradoxalement troublant.
Dans ce roman, où flirtent différents genres, le futur, le passé et la réalité alternative des personnages s'entrecroisent.
Au fil des pages, les liens de l'imaginaire se trament avec ceux du réel, pour former l'étrange toile de fond d'un univers dense et varié.
Au fil des pages, le lecteur évolue avec chaque personnage, reconnaissant une partie de lui-même dans chacun d'eux.
Au fil des pages, le lecteur se trouve confronté au doute qui mûrit inexorablement.
Au fil des pages, le lecteur craint ne jamais répondre à ses interrogations et pourtant il va essayer car nul choix ne lui sera laissé.




J'ai illustré moi-même chaque paragraphe, 
ceci étant un choix personnel, voire un besoin intrinsèque.

Vous trouverez un diaporama de mes planches d'illustration en présentation du roman sur ce lien :





CHAPITRE I :

en intégralité pour les lecteurs de ce blog !!!!!!!




« Un paysage est le fond du tableau de la vie humaine. »
Bernardin de Saint pierre, écrivain français




Terran, Iloane et Sung foulaient le sable de cette immense plage qui se déroulait devant eux. Charbelle était restée assise à les attendre à même le sable.
- Vous voyez là-bas, en contrebas de la montagne, il y a une forêt. C’est étrange une forêt si près de la mer…Nous allons peut-être y trouver du bois pour faire un feu.
Terran venait d’asseoir son rôle de chef de clan, sans que personne y ait vu un contre ordre. Chacun obéit, chacun se tut, chacun dirigea ses pas vers cette forêt si près de la mer, les uns derrière les autres, sans mots dire. Charbelle ne bougea pas et ne les regarda même pas s’éloigner.
Nettoyée de cette situation incongrue, nettoyée de ce sentiment d’inconnu, nettoyée de l'horreur de ce crash aérien, cette plage aurait pu être paradisiaque…Oui, certainement, elle pouvait rivaliser avec tous les havres de beauté et d’exotisme présentés dans les magazines. Ces photos qui crèvent la page et qui transpercent votre cœur tant la beauté du paysage est subjuguante, tous les avaient tant admirées et adulées !

La forêt leur apparaissait en contre bas ; ils y pénétrèrent précautionneusement. Toutes les espèces d’arbres et de plantes y semblaient représentées et un tel fouillis de variétés entremêlées et inorganisées commençait à les oppresser. Il y faisait très sombre en ce jour déclinant et ils n’osèrent pas s’y aventurer plus profondément.
- C’est bizarre autant d’arbres et de plantes différents pour une forêt…Ou alors, ce n’est peut-être pas une forêt.
Terran sourit nerveusement de la remarque inopportune de Sung.
- Tu me fais rire avec tes remarques botaniques. Pour l’instant, ce que l’on cherche, c’est du bois mort pour faire un feu.
Iloane se baissa pour ramasser quelques branches gisant au sol.
- Vous sentez cette odeur de verdure ? C’est vraiment enivrant !
- Mais qu’est-ce qu’il vous arrive à tous les deux ? Après tout ce qu'il vient de se passer: on vient de vivre un terrible crash aérien, on est miraculeusement survivant et vous parvenez à avoir l’humeur bucolique! L’essence des arbres, l’odeur des arbres…On va peut-être tous crever ici, il y a peut-être des cadavres tout près de vous, et c’est tout ce que vous trouvez à dire ! On va peut-être mourir de faim ou de soif ou dévorés par un animal féroce ou mieux par des cannibales quand ils se seront aperçu de notre présence ici…Et vous pensez que l’odeur des arbres a une importance dans ces moments-là ?
Terran était en train de perdre son sang froid, d’exorciser ses angoisses si profondément refoulées. Etre le chef de clan lui donnait de la prestance et de l’assurance mais pas assez apparemment pour rester hautement digne et courageux. Il s’effondra en sanglots.
- J’ai peur de mourir !
Iloane le serra dans ses bras, très fort, très très très fort. Elle ne savait pas que lui dire mais son étreinte remplaçait tous les mots du monde.
Ils « s’aimèrent » ainsi passionnément pendant quelques instants furtifs. Iloane ne cessait de fixer le regard embué de Terran et, comme pour sceller cet instant fugace, elle repensa à un poème d’Alfred de Musset qu'elle avait lu dans l'avion. Pourquoi une telle idée saugrenue ? Elle ne savait pas, juste pour la beauté du poème, juste pour la beauté du moment...Elle le récita tout bas au fond de son âme :

Adieu

« Adieu ! Je crois qu’en cette vie
Je ne te reverrai jamais.
En te perdant, je sens que je t’aimais.
Pas de pleurs, pas de plainte vaine.
Je sais respecter l’avenir.
Avec orgueil tu reviendras.
Mais ceux qui vont souffrir de ton absence,
Tu ne les reconnaîtras pas. »
Terran, elle ne le connaissait pas, mais les kaléidoscopes de leurs vies venaient de se superposer à jamais, sans raison apparente.
Sung était ému au plus profond de son être mais ne le montrait pas. La mort, il y avait pensé lui aussi, mais en parler ouvertement le mettait très mal à l’aise. Il leva les yeux au ciel, comme pour chercher de l’aide dans l’au-delà imperceptible et là…son étonnement fût à son comble.
- Mon dieu ! C’est…Mon dieu ! Regardez ce ciel. Mon dieu !
Terran et Iloane, dans les bras l’un de l’autre, levèrent les yeux au ciel. Le jour venait de décliner, la nuit venait insidieusement de prendre possession du firmament, sans que nul d’eux trois ne s’en soit aperçu. A travers les branches des hauts habitants de cette forêt, des morceaux de ciel noir apparaissaient, constellés d’étoiles, de millier d’étoiles…Des milliers d’étoiles piquaient le ciel de milliers de points multicolores donnant au paysage une clarté indéfinissable. Chaque couleur, chaque teinte, chaque irisation avait pris possession d’une étoile comme pour rehausser le noir du firmament, donnant au ciel un aspect magnifiquement splendide et magnifiquement énigmatique.
- C'est magnifique. Comment cela est-ce possible ?
Ils se hâtèrent de regagner la lisière de la forêt et restèrent tous les trois là, les bras chargés de branchages, les yeux rivés au ciel. Parsemée de couleur, la nuit semblait moins dantesque, moins noire. Le spectacle était magnifique. La scène était époustouflante. La magie de l’instant les étreignait. « La magie », c’était vraiment le mot précis et concis qui définissait leur humeur présente.
- Mais comment est-ce possible ?
Terran fouilla au plus profond de ses souvenirs scientifiques, car il savait qu’il fallait qu’il trouve un embryon d’explication, même minime, même incroyable, pour rassurer Iloane.
- La présence de gaz dans le ciel…Je ne sais pas…Certains gaz ont peut-être interagi avec le spectre photonique de la luminescence des étoiles.
Iloane ne décrochait pas son regard de ce firmament étrange.
- Tu racontes n’importe quoi. Quels gaz ? Quels spectres ?
Terran s’était bien rendu compte qu’une explication si rocambolesque était dénuée de tout sens commun. Vouloir rassurer Iloane n'avait fait que l'apeurer davantage.
Sung, quant à lui, semblait imperturbable :
- Dans la vie, il ne faut pas toujours vouloir tout expliquer. La part qui demeure inexplicable, c’est elle qui nous fait vivre et survivre.
Iloane ne semblait pas approuver le sage concept de son ami asiatique.
- Tu raisonnes comme un grand sage bouddhiste, mais moi, je ne possède pas ta philosophie, ni ta sagesse. Il faut que je sache, tu comprends ?
Ses yeux étaient toujours rivés au ciel, comme si jamais elle ne pouvait envisager de s’en détacher ; elle tourna sur elle-même, porta les mains à ses oreilles, tourna, tourna encore, comme emportée par le tourbillon de la folie, l’effervescence de la psychose, et se mit à hurler d’une voix éraillée et malade :
- La lune !!! Il n’y a pas de lune dans ce ciel !!!
Þ
Ils avaient rejoint Charbelle pour la rassurer, mais ce devait être la seule rescapée à ne pas avoir besoin d’être rassurée. Tout le monde avait commencé à s’organiser pour la nuit, mais l’organisation méthodique avait peu à peu laissé place à une effervescence psychotique : plus la nuit tombait, plus ce spectacle étrange s’imposait, plus la panique et l’effroi s’étaient emparé de chacun d’eux. Les plus cartésiens cherchaient en vain une explication, les plus philosophes cherchaient également une explication dans un domaine différent. Mais une explication plausible, c’est tout ce que chacun aurait voulu ici et maintenant.
Des idées saugrenues, des histoires rocambolesques, des récits hallucinants germaient à chaque coin de cette plage paradisiaque transformée en lieu de psychose le temps d’un crash aérien.
- Quand l’avion a commencé sa terrible descente, j’ai vu les aiguilles de ma montre s’affoler et tourner à toute vitesse dans un mouvement et une cadence infernales : elles ne s’arrêtaient plus. Vous croyez qu’il s’agit d’un phénomène électromagnétique ?
- A l’aéroport, j’ai eu un terrible mauvais pressentiment. J’ai essayé d’y faire face et de me faire violence mais je savais intimement que quelque chose allait se produire. Vous croyez qu’on est tous mort ?
- Mon guide spirituel avait lu dans les runes, que j’allais effectuer le voyage de ma vie. Vous croyez que c’est mon dernier voyage ?
- Jusqu’au dernier moment, les aléas de la vie m’ont fait annuler mon voyage. Ce n’est que douze heures avant le décollage que j’ai décidé de partir quand même. Je n’ai pas voulu obéir à ma bonne étoile parce que je suis obstinée et entêtée. Je n’ai pas voulu écouter la sagesse qui coulait en mes veines. Vais-je aujourd’hui le payer au prix fort et le regretter à jamais?
- Je ne sais pas où je suis et pourquoi j’y suis mais je ne suis pas comme vous…Moi, je me battrai et je partirai d’ici.

Chacun épiloguait ainsi, régi par la peur, l’angoisse, la haine, la résignation, l’acceptation.
Chacun faisait à sa manière le point sur ses états d’âme, remettait en cause un grand nombre de conceptions pré acquises.
Chacun mettait à nu son âme, rongé par des remords inavoués ou des sentiments refoulés.
Chacun trouvait le réconfort comme il le pouvait, mais tout le monde souffrait en silence.
Il y avait les caractères forts, les résignés du « c’était écrit », les incertains psychotiques, les adeptes du fatalisme, les éternels « en doute ». Tous les caractères semblaient représentés sur cette plage, comme une micro représentation du genre humain, un microcosme du peuple terrien dans toute sa splendeur, positive comme négative.
Terran, Iloane et Sung s’assirent tout près de Charbelle. Leur amie malienne était toujours enfermée dans son regard sans horizon. Elle ne réagissait toujours pas, elle ne parlait toujours pas, mais elle ne semblait avoir aucun doute; elle avait mis fin à ses interminables incantations, comme apaisée et enfin sereine. Une nuit multicolore et sans lune pesait sur ses épaules ; elle saisit une brindille de bois et délicatement, traça dans le sable mouillé, lettre après lettre, le mot : D-E-S-T-I-N-E-E.
Terran le caractère fort et l’âme en peine, Iloane la rebelle incertaine et Sung le philosophe pacifique, l’observèrent longuement sans rien dire. C’était peut-être ça, la clef du mystère…
- Il faut allumer le plus de feux possibles si on veut avoir la chance d’être repéré par les secours.
Une voix les tira ainsi de leurs pensées, leur donnant un ordre auquel ils obéirent tous mécaniquement. Les secours, d’ailleurs, ils n’y pensaient plus et ne les envisageaient même plus. L’instinct de survie qui caractérise l’être humain tout comme l’animal leur donna la force et l’énergie. Terran craqua une allumette, attisa les flammes, conserva les braises et le feu jaillit du tas de brindilles et de bois mort qu’ils avaient entassé.

La nuit
La mer
Les crépitements du feu
Le sable fin
Il ne manquait plus que quelques accords de guitares
Et……………….
La lune.




CHAPITRE I I:

Toutes ces origines, ces vies, ces destins différents tissés anarchiquement dans n’importe quel sens, se rejoignaient ici, en ce point, aujourd’hui et maintenant….Elle trouvait ça beau. C’était un petit groupe soudé le temps d’un voyage, des rires cristallins s’en échappaient, des histoires y foisonnaient et ce petit groupe éclaterait à la fin du voyage, chacun le savait et en était parfaitement conscient.
Mais, en cet instant, Iloane était heureuse avec eux : tant d’insouciance et de bonne humeur allégeaient le fardeau de son âme, devenu lourd à porter depuis quelques temps.
A travers le hublot, elle apercevait des chapelets de nuages en ce jour déclinant. Bientôt il ferait nuit dans ce ciel inconnu, survolant ces pays étrangers et elle était heureuse. Sentiment bizarre, depuis que ça ne lui était pas arrivé.
[]
A ce moment, l’avion atteignit un point d’impact dans un bruit sourd. L’avion explosait-il ? L’avion se désintégrait-il ? Terran tendit la main vers le néant et perdit connaissance. La seule chose qui le reliait au milieu extérieur, c’était le bruit sourd de la carlingue, mais au loin, au fond de lui-même, retentit un petit tintement cristallin doux et apaisant et il se mit à penser :

« C’est ça mourir ? »


CHAPITRE  III:

Tous trois se lancèrent à sa rencontre :
  • Sung, méticuleusement habité par l’humilité, habitué à n’être remarqué par personne et à ne surtout pas aller vers autrui, sentait vibrer en lui une âme de secouriste.
  • Terran, assis sur ses principes de totale liberté, habitué à n’exister que pour lui-même et grâce à lui-même, sentait vibrer en lui des sentiments innommables pour des personnes qu’il ne connaissait pas.
  • Iloane, habitée par les mêmes principes de liberté, d’autosuffisance sentimentale et de refus total d’autrui dans sa vie personnelle, sentait vibrer en elle l’amour et l’amitié.
Que cet état de laisser-aller avait un goût sucré et doux pour chacun d’eux ! Mais qu’il était amer et âpre de se retrouver perdus en terre inconnue, échoués sur le rivage de sa vie, privés de tout repères rassurants.





















CHAPITRE  IV:

 Pour t’abandonner Iloane, faudrait-il que je t’ai acceptée sous mon égide. Mais tu n’es rien
pour moi.
La vie se déchira pour Iloane, une déchirure brutale et irréparable.
RIEN
Néant – Absence – Zéro – Manque – Nul – Insignifiance – Vide – Aucunement
RIEN

Ce mot résonnait dans ses tempes, retentissait dans son cœur, chavirait son regard, lui rongeait son âme, éteignait la flamme de son être. Réduite à RIEN et sans énergie, elle regarda Terran s’éloigner sans mots dire. Il ne se retourna pas comme elle l’espérait tant, encore accrochée à une lueur d’espoir. Elle crût à ce moment-là qu’elle l’aimait et que cet amour impossible tiendrait à jamais sa vie dans une cruauté infernale.
Elle respecterait sa loi.
[]
Elle murmura très bas, comme pour ne pas s’entendre elle-même :
- Tu as tué mon dieu intérieur.
Mais les dés étaient désormais jetés et elle ne tricherait pas : Elle lui obéirait.
[]
Et la cruauté de cette situation traverserait les siècles et les siècles de sa force suprême.

CHAPITRE V :

Terran ne semblait pas avoir fait cas de la résignation désabusée d’Iloane. Il était parvenu à un tel stade dans son cheminement personnel, il avait vécu tant de chocs et de chaos depuis quelques heures, et il avait tellement eu peur de la mort, que son cœur et tout ce qu’il contenait s’était subitement cristallisé et refermé sur lui-même. Sa prestance et sa condition de « chef » avaient pris largement le dessus et contrebalançaient son manque total de sentiments humains pour autrui.
Qu’était-il ? Un robot ? Une machine ? Quelque chose de ressemblant, programmé pour avancer tête baissée ?
C’est avec ce sentiment désabusé qu’il pénétra fièrement dans la forêt qui lui faisait face, tel Jules César dirigeant son bataillon de légionnaires fantassins à la bataille d’Alésia.
SPQR Senatus Populus Que Romanus, toute une république perdue…
[]
Il ne faut surtout pas perdre de temps.

Le temps – décidément, cela semblait symboliser la clé de leur mystère.
Le temps – le temps de quoi d’ailleurs ?

Oublier le passé, vivre le moment présent et préparer l’avenir : il faut beaucoup d’entraînement pour parvenir à maîtriser le temps…qui passe à pas de géant.



CHAPITRE VI :

Un, deux, trois, quatre, cinq.
Terran, Sung, Sunnivan, Dylan et Moana.
Côte à côte sur une crête rocheuse, ultime but de leur traversée, perdus au milieu d’une lande hostile et aride.
Cinq êtres humains, pétris d’amour, de faiblesse, de beauté, de vie, côte à côte sur une crête rocheuse. La douce brise caressait leur visage : que cet instant était suave et bienfaisant, que ce sentiment futile était chaleureux, après avoir contré le vent torride et sableux d’un désert sans âmes.
Cinq êtres, rois de pacotilles et princes démunis, d’une insignifiance ironique : ils étaient là, sur cette crête rocheuse, totalement démunis et totalement muets ; leurs mains se rejoignirent et se serrèrent.
Ils n’étaient rien et sur cette hauteur si difficile à atteindre, le sentiment d’être les rois du monde s’évanouissait dans leurs yeux. Ils se donnaient la main pour ne pas se sentir seuls, leur voix était paralysée, leurs yeux tétanisés.
La douce brise ne cessait de caresser leur visage, seul mouvement incessant de ce tableau humain.
[]
- Vous devez être les seuls à ne pas avoir entendu parler des travaux d’Adamante.
Adamante, c’était un bien joli prénom…et chacun se tut, de peur de pénétrer au plus profond la folie de ce jeune homme décalé. Mais était-il vraiment fou ? Vivait-il dans un monde virtuel inventé par lui-même ? S’était-il établi intimement des concepts et des règles strictes à respecter ? Ne supportait-il pas qu’autrui ne les applique pas ? Jusqu’où pouvait-il aller pour défendre la réalité imaginaire de son monde virtuel ?
L’arrivée au village de Brauvil allait peut-être éclairer l’inquiétante apparence de cet être fantasque. Il ne pouvait pas appartenir à une tribu car sa façon de communiquer était bien trop évoluée. Il ne pouvait pas partager la vie urbaine d’une ville civilisée : son apparence y aurait juré. Mais qui était-il ? D’où était-il arrivé sur la crête de cette haute montagne ? Enigmatique, il l’était…et pourtant chacun le suivait comme s’il s’agissait de leur ultime espoir.
« Ce village c’est le Bonheur ou le Malheur ».
Moana se remémorait cette terrible phrase qu’avait prononcée Terran avec empathie.


CHAPITRE VII :

Oui, elle était belle, mais pas seulement et simplement belle. Il l’observa se nourrissant avidement de chaque détail décelé ; Elle semblait totalement décalée, décalée du temps ou décalée tout court. Il l’aurait décrite comme une princesse médiévale, ou une aristocrate romaine, comme un personnage fort et haut en signifiance.
- Gemuse dorweên.
Elle prononça ces deux mots qu’il ne comprit hélas pas mais il puisa dans cette voix toute la force qu’il lui manquait pour répondre
[]
- Alors, mon année de naissance vous fait rire ? C’est étrange. Et vous, quand êtes-vous née ?
- Moi ? En 3575 soit 19 vies après vous.
Ils rirent tous les deux de cette remarque et se prirent au jeu de leur conversation. Tout à coup Gaïa fit preuve de méfiance, comme si elle sentait que ce jeu allait beaucoup trop loin et devenait dangereux.
[]
Elle était si près de lui et si loin à la fois, complètement coupée de lui par sa conversation houleuse et animée avec ses deux amis. Elle était en grand pour parler avec eux, une frénésie rebelle animait son corps et elle ne semblait pas du tout partager le même avis qu’eux. Son regard ne reflétait plus la douleur, mais partait à contre courant, loin, vers les rives de la haine et cette haine la faisait vibrer. Terran se demandait qu’elle pouvait bien être la cause d’une telle haine et sentait bien que leur présence à tous les cinq y était un tant soit peu liée. Mais pourquoi ? Qui étaient réellement ces individus ? Vivaient-ils dans l’illégalité ? Détenaient-ils un secret universel ? Cherchaient-ils à protéger quelque chose ou quelqu’un ? Pourquoi jouaient-ils ainsi ce jeu pervers et dissimulé ? Pourquoi Donn et Gaïa avaient-ils essayé de les perdre dans leur folie virtuelle respective ? Cette folie était-elle destinée à dissimuler un secret ? Il voulait en savoir plus et il était bel et bien décidé ; le temps s’était momentanément stoppé afin qu’il trouve la force intrinsèque de trouver la clé de ce mystère et cette force intrinsèque qui le tirait vers l’avant, plus il admirait Gaïa, plus il était intimement persuadé que SA force à lui, c’était elle.


CHAPITRE VIII :

- Votre évolution, résultat de la mienne ? Mais je ne vous connais pas, je ne sais pas qui vous êtes.
Le regard d’Aaron s’endurcit, celui de Gaïa également. Terran perçut clairement que sa réaction avait choqué mais il ne comprenait pas en quoi ; il était perdu, totalement perdu, dans un océan de questions sans réponses. Allait-il s’y noyer ?
- Terran, je peux voir dans tes souvenirs, car je suis l’inéluctable résultat de toi !
[]
Terran restait abasourdi par cette litanie de détails incongrus, par cette imagination féconde, par le charisme avec lequel Aaron narrait son histoire en laquelle il semblait croire avec ferveur et puis par Gaïa qui le soutenait si bien dans son rôle de conteur. Mais Aaron était-il réellement un conteur ?
Il ferma les yeux et vit le visage angélique d’Iloane, au milieu de cette douce nuit sans lune qui les avait réunis :

Terran et Iloane
« Terre » et « Ile » sont deux mots
interdits
parce qu’il faut en effacer le souvenir …

CHAPITRE IX :

Elle préleva dans son regard toute la force nécessaire pour continuer.
- Si tu désires retourner dans ton époque et je sais que tu le souhaites très fortement, si tu veux rejoindre ton ère, repasser outre le mur du temps, ce mur que tu n’aurais jamais dû franchir, je peux t’aider.
- Tu peux m’aider, mais comment ?
Terran ne savait plus vraiment s’il existait ou s’il jouait son existence, mais la peau de Gaïa était si douce contre la sienne. Il la serrait dans ses bras, il la serrait contre lui et que ce soit un jeu ou non, peu lui importait ; il profitait du moment présent ; en quelle année vivait-il, il s’en moquait éperdument.
- Tu dois restituer de l’énergie combustible afin de relancer le moteur de ton engin, ton a….vi..on je crois. Si tu souhaites rejoindre ton ère, tu vas devoir reconstituer le trio énergétique et je t’aiderai à le faire.
[]
Il lâcha Gaïa et leva les mains vers le ciel. La nuit commençait à décliner, piquée de milliers d’étoiles multicolores. L’instant était magique et incompréhensible. Il ne comprenait plus ce qui chamboulait à ce point son âme froide et impénétrable. Il se prosterna à terre et hurla vers le ciel :
- J’accepte, j’accepte, j’accepte !!! Gaïa, tu es devenue mon addiction et je jouerai ton jeu jusqu’au bout.
[]
Les étoiles multicolores scintillaient de leurs merveilleux jeux de lumière dans une nuit profondément noire.
Qui était Terran et Gaïa ?
Le savaient-ils eux-mêmes ?











CHAPITRE X :

- Et vous voyez ce soir, c’est quand même une occasion unique : je reçois des êtres venus de dix-neuf vies précédents la mienne.
Ses yeux brillaient de bonheur ; ou de folie…
- Et je lève ma coupe à toi, Terran.
- Non ! Ne lèves pas ta coupe en mon honneur. De l’honneur, je n’en mérite aucun. Tu ne me connais pas, tu ne sais pas qui je suis.
- Peut-être, mais ce soir, oublions le temps, les siècles, les vies, les disparitions, l’amour, les trahisons, les addictions, et faisons de l’honneur ta force.
- Gaïa, s’il te plait…



CHAPITRE XI :

- Ces arbres dépouillés symbolisent l’espoir : nous sommes ici sur le canal de l’espoir. Pourquoi l’espoir ? Parce que tout un chacun garde en coin de son âme l’espoir secret et inavoué qu’un jour, ces arbres bourgeonneront à nouveau pour nous ouvrir un autre cycle de vie. Tu vois, l’espoir, c’est ça pour nous. Pour toi, c’est échapper jour après jour à ce que tu appelles la mort. Pour nous, c’est voir un jour un arbre bourgeonner.
[]
- C’est ici que mes parents m’ont appris ta langue pour la première fois…Regardes bien cette stèle.
Chacun s’en approcha et se sentit épié par les passants qui traversaient la place. On pouvait y lire, gravé dans leur langue une phrase lourde en signification : « une génération a disparu, une autre apparaît, mais la Terre demeure à jamais ».
- Mais pourquoi ces gens nous observent-ils ainsi ?
- Parce que vous vous êtes approchés de la stèle…et cette stèle fait peur à tout le monde.
- Peur, mais peur de quoi ?
- Peur de vous, de votre époque, de votre inconscience, de vos actions intransigeantes, de vos raisonnements perfides, de vos pensées diaboliques, de votre suicide collectif. Il en a fallu du temps pour relever la face de l’être humain, il en a fallu du temps pour essuyer les dégâts de vos intransigeances incontrôlées et jamais, ô grand jamais, nous ne pourrons réparer. Votre civilisation, votre langue, tout ce qui se rapporte de prés ou de loin, à vous, nous fait très peur ; Terran, je suis l’inéluctable résultat de toi, tu le sais…

CHAPITRE XII :

- Terran, je vais être le cyclone de ton existence, je vais habiter tout au fond de ton âme et devenir ton maître, ton seul maître. L’addiction, toute ta vie tu connaîtras. Ton addiction traversera tous les temps. Alors, viens, acceptes et devant Nihil, baisses la tête et éteins ton regard.
Terran baissa la tête 
[]
- Terran, ton monde, mon monde, est à la dérive. Tu ne pourras pas survivre ici, ni là-bas, car de ton sang je vais me saouler. Ne crois surtout pas que tu peux être protégé par Gaïa ou qui que ce soit. Je t’ai ouvert les geôles du doute, tu viens d’y pénétrer ; maintenant la terreur de toi-même t’escorte et le royaume du doute vient de refermer ses portes sur toi. Tu vas y mourir, parce que c’est Nihil qui l’a ainsi décidé.

CHAPITRE XIII :

L’entrée de la bibliothèque imposait également sa majestuosité, ceinturée par deux colonnes colossales, comme pour témoigner de l’importance de la culture et du savoir qu’elles gardaient. Ils s’arrêtèrent sur le pas de cette magnifique entrée : hésitation ou peur ? Réflexion ou solitude ? Peut-être allaient-ils y découvrir des secrets inviolés depuis la nuit des temps, peut-être ressortiraient-ils de cet antre de savoir totalement métamorphosés, peut-être ne seraient-ils plus jamais les mêmes…Mais comment pouvaient-ils le prédire ? Une petite voix palpitait dans leur cœur pour leur chuchoter que ce moment était important, que leur arrêt sur le parvis de cette bibliothèque était loin d’être anodin.
[]

Après avoir posé les paumes de ses mains sur le bois, elle attendit quelques secondes, comme si le temps s’était arrêté pour elle. Elle poussa la porte et ils se retrouvèrent dans une immense salle. Le sol n’était que terre battue, il était recouvert d’une épaisse couche de sable terreux et poussiéreux. Gaïa se baissa, prit une poignée de sable dans ses mains et le laissa lentement s’écouler au travers de ses doigts.
- Du sable terreux, l’essence perdue de notre planète…

CHAPITRE XIV :

Terran était ailleurs. Il s’était agenouillé dans le sable, sans rien dire, sans savoir pourquoi, mais là, il était happé par une force qui le dépassait. Du bout de son index il dessinait dans le sable, de la paume de sa main il arasait le sable pour faire disparaître ses dessins…Et il recommençait, et il ne s’arrêtait jamais, et il allait de plus en plus vite comme guidé par un automatisme incontrôlé. Ses yeux étaient fixes, mais son corps semblait en totale ébullition. Il exultait, il laissait son imagination hors contrôle, il laissait enfin libre cours à ses visions intrinsèques ; sans vouloir les contredire, sans vouloir les refouler, sans vouloir les anéantir, elles se déversaient dans son sang, immense torrent de révélations et il pouvait les retranscrire par automatisme. Cette fois Iloane ne faisait pas partie de son champ de vision. Cette fois, c’était différent, totalement différent. Il voyait des milliers de choses, détails, images, se superposer, se fondre, les unes dans les autres, ils voyaient des lambeaux de papyrus, des morceaux d’énigmes arrachés au passé et puis il ne les voyait plus, et puis tout affluait dans le désordre, par le petit portillon de son esprit. Une cascade d’informations noyait ses perceptions : sensation jouissante et cruelle à la fois.
[]
Refuser cette télépathie : il devait se concentrer pour y parvenir, sinon « fou » il le deviendrait et devenir « fou » sciemment devait être terrible !
Gaïa poursuivit son explication car elle n’avait pas remarqué la gêne de Terran.
- Adamante détient un joyau. Tout le monde en parle sans trop saisir de quoi il s’agit véritablement : il est serti sur une bague. Ce Joyau ressemble à une émeraude mais ce n’en est pas une. Aux dires d’Adamante, cette pierre contient un atome inconnu ainsi que certaines informations génétiques dont l’exploitation à mauvais escient pourrait faire exploser notre monde. Adamante détient la sagesse, Adamante ne se sépare jamais de son joyau, j’en suis persuadée.
[]
- Tu as enfin eu la révélation. Tu as enfin compris que je ne jouais pas un jeu avec toi.
Le bonheur de Gaïa fût hélas de courte durée. Terran, devenu sombre la glaça du regard:
- Rien! Rien ne me prouve que tu ne joues pas un jeu avec moi.

CHAPITRE XV :

Chacun pensait être victime d'une infernale machinerie mais nul ne pouvait s'avouer être victime d'un jeu machiavélique et chacun souffrait à sa manière de cette situation.
- Nous survolons la vallée des météorites
Chacun vivait cette histoire « humanitaire » à sa manière, mais la situation les avait réunis dans ce minuscule espace vital où ils devaient se serrer les uns contre les autres, ce qui ne les empêchait pas de se sentir éperdument seuls.
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« Je suis une enfant de l'amour » - Cette phrase retentissait dans leur tête avec fracas, tel un leitmotiv enivrant et inoubliable, alors que l'aéronef se posait plus ou moins délicatement sur une plateforme rocheuse à l'orée de la forêt bleue.

CHAPITRE XVI :

Une sensation envahissante et captivante les enveloppait. A chaque pas, ils avaient peur, après chaque arbre, ils se sentaient rassurés...Et ce bleu à perte de vue déclinait mille teintes, mille tons dont ils ignoraient jusque là l'existence: bleu - bleu ciel - bleu azur - bleu cyan - bleu marine - bleu magenta - bleu turquoise - bleu dur - bleu pastel - bleu indigo - bleu vert - bleu nuit – bleu – bleu - bleu et encore bleu. Leurs yeux étaient captivés, rivés, émerveillés, ébahis, transportés à chaque vague de bleu qui les submergeait.
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Ces insectoïdes volants ne devaient pas les atteindre, les toucher, les piquer: telle était leur unique quête en cet instant précis. Ils enjambaient buissons et racines, ils contournaient arbres et rochers, ils sautaient branchages et végétaux; bleu, bleu, bleu, ils ne voyaient que cette couleur étaler ses différentes teintes à une vitesse vertigineuse. Tout se mélangeait dans leurs yeux horrifiés, tous ces bleus se mêlaient dans une cacophonie visuelle éperdue: le désordre était bleu, leur peur était bleue, leur sang était bleu, leurs coups étaient bleus.
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Ma tête explose, ma tête me fait horriblement mal.
Terran hurlait d'une voix rauque, serrant sa tête entre ses deux mains, étau salvateur de sa conscience. Il hurlait d'une voix outre-tombale et nul n'osait plus l'approcher.
- Je suis fou, je suis fou, vous comprenez?
L'évocation de ce seul mot fit tressaillir Aël. Fou, folie, tête, aliénation, psychiatrie, camisole, force, diable, il se refusait à penser à tout ça, il n'avait pas le droit d'y penser.
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« Fou », tu es différent donc tu es fou, plus personne ne t'approchera, plus personne ne t'aidera, la terreur tu sèmeras, et tu crèveras...Nous n'irons pas jusqu'à graver le mot « fou » sur ta pierre tombale, mais de toute façon, nul ne viendra se recueillir sur ta tombe.
« Fou », ta vie tu l'as souhaitée différente, tu vivras un enfer pour avoir osé être différent.
« Fou », tu as voulu parler de concepts interdits, plus personne ne t'écoutera.
« Fou », tu as voulu ériger ta propre vision du bonheur, le malheur nous nous appliquerons à cultiver pour toi.
« Fou », nous aurons ta peau et si tu ne te suicides pas, ton isolement te tuera.
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Les hologrammes de Gaïa et d'Iloane se mélangeaient, se fondaient l'un dans l'autre, se superposaient, se séparaient, s'assemblaient, et toujours, encore et toujours, la plaie d'Iloane et le tatouage de Gaïa dansaient dans son esprit rêveur. Un infernal tourbillon d'images dissociées habitait son esprit vagabond.
Etait-il réellement télépathe, ou visionnaire?
Non, il réfutait cette éventualité avec force car il le savait bien : il était fou et son état ne cessait d'empirer. Le passé, le futur, le présent, plus rien n'avait de signification pour lui: une fuite temporelle éternelle, telle semblait devenir sa destinée.

CHAPITRE XVII :

Il ouvrit la bouche, tentative avortée d'explication désuète à toutes les interrogations de ses amis. Adamante le fixait et seuls deux mots s'échappèrent de sa bouche:
- Asteria Rubens
Le nom scientifique de cette étoile de mer, il l'avait toujours connu et ces deux mots étaient étrangement les seuls à pouvoir résumer son état d'âme.
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Gaïa, princesse médiévale ou aristocrate romaine – Gaïa, âme du village de Brauvil, ou habitante de la ville de Romulia – Gaïa qui ne connaissait pas le mot avion et s'interdisait de prononcer le mot « île » - Gaïa au bracelet anti-radioactif et à l'anneau de bois – Gaïa tatouée par sa lignée génétique et enfant de l'amour – Gaïa adepte du « Carpe Diem » et horrifiée par les nihilistes – Gaïa qui n'a vu la mer qu'une fois – Gaïa qui les observait ici au milieu des asteria rubens à sept branches – Gaïa télépathe, visionnaire ou terriblement joueuse – Gaïa, dix-neuf vies après, perdue dans son monde virtuel ou dans sa folie – Gaïa qui aimait tant ce poème – Gaïa, l'alter ego de Terran, l'autre facette de lui-même:
- Terran, tu ne dois pas t'en aller.
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Beaucoup de rescapés tiennent des propos non cohérents mais cette incohérence est uniformément générale: ils racontent tous les mêmes histoires rocambolesques et étranges. Seules, deux personnes sont portées disparues et introuvables et …
- Moana, Dylan...
- Mon dieu, tu les connaissais?

CHAPITRE XVIII :

Lecteur,
qui que tu sois,
où que tu sois,
il est grand temps pour toi d'amarrer ta barque sur les rives de tes lectures, de stopper ton voyage au pays de la littérature et de prendre enfin ton temps pour réfléchir.
Tu as eu l'impression d'errer au fil de ces pages, sans trop savoir où tu étais, sans trop savoir quand tu étais.
Mais tu n'es pas perdu.
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L'auteur vient de t'injecter son histoire.
Cette histoire vit maintenant dans ta tête et continuera à vivre bien au delà de ce livre.
Cette histoire vient de t'ouvrir la porte à des interrogations personnelles auxquelles toi seul peut essayer de répondre.

CHAPITRE XIX :

XIX vies avant ou XIX vies après, l'auteur, pour te remercier de ton attention, te livre ces quelques phrases ...




Dépôt SGDL N° 2010-11


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